PREAMBULE : J’utilise principalement Canon et FujiFilm parce qu’ils correspondent le mieux à MON usage du moment. Je ne prétends nullement qu’ils soient meilleurs que d’autres et n’ai d’allégeance pour aucune maison en particulier.
Ce post n’est pas un test technique, vous trouverez bien mieux sur la toile notamment celui de JF VIBERT que je recommande : http://photoetmac.com/2019/03/prise-en-main-du-canon-eos-r/. Ce post se limitera à un ressenti d’utilisateur 56 000 clichés plus tard, ses qualités, ses faiblesses et les quelques particularités dont on parle peu mais qui m’ont changé la vie. Avant de m’étendre sur l’EOS R en particulier, je vais brièvement rappeler 2 points qui plaident pour Canon en général :
Les objectifs
Si je ne devais citer qu’une raison à mon maintien chez Canon, ce serait le parc d’objectifs. A l’heure de l’écriture de ces lignes il existe 93 optiques en monture EF chez Canon de 8mm à 800mm auxquelles on peut rajouter les propositions Sigma, Tamron, Samyang… assurant que les marchés du neuf et de l’occasion soient saturés et ceci pour le plus grand plaisir de mon portefeuille. Ce rapport qualité/diversité/prix est encore inégalé à la concurrence.
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Les couleurs
Si mon premier point était objectif (sans jeu de mots), ce second point relève de goûts personnels. Je recherche un certain look pour mes photos et les RAW Canon sont plus faciles à éditer que d’autres, les oranges et les rouges sont plus doux, j’y passe tout simplement moins de temps. Vous remarquerez sur l’ensemble des articles de ce blog que la colorimétrie des photos proposées est constante et si je dois trier des centaines de photos puis harmoniser les couleurs, je préfère un format qui m’autorise à le faire en un minimum de temps.
Au sujet de l’EOS R :
Quelles sont mes principales satisfactions ?
Le poids
Le poids est pour moi une préoccupation constante. Quand on voyage en sac à dos et qu’on est susceptible de garder celui-ci sur les épaules toute une journée, chaque gramme compte. Chez Canon, les options légères Plein Format ne sont pas nombreuses :
5DIII 950g
5D4 890g
6DII 765g
EOS R 660g
EOS RP 485g (J’en reparlerai plus bas)
La différence de poids peut ne pas paraître impressionnante mais au-delà du boitier, une stratégie de réduction de poids doit s’inscrire et s’apprécier sur l’ensemble du kit. Mon Kit de voyage change régulièrement selon les destinations mais assez souvent il se composait comme suit : Canon 5D Mark III, Sigma 24-105 F/4, Sigma 35mm F/1.4 ART pour un total de 2,5kg. Désormais, je voyage avec un EOS R, un Canon 24-105 F/4 en monture RF et le RF 35 mm F/1.8 stabilisé pour un total de 1,675kg et par ricochet, avoir un kit plus léger m’a aussi permis de remplacer mon trépied pesant 1,5kg par un trépied moins performant de 900g (Je reviendrai sur ce point plus bas).
Mon gain total est de 1,425kg. Mes épaules sont reconnaissantes.
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La dynamique
L’EOS R partage le capteur du 5D Mark IV qui est toujours le meilleur capteur Canon à cette date, ça changera bientôt avec l’arrivée de nouveaux modèles mais la plage dynamique de celui-ci est bien meilleure que tout ce que j’ai pu voir chez Canon jusqu’ici. Vous pouvez en juger par l’exemple volontairement extrême ci-dessous.
Dans un usage plus réaliste, il est véritablement possible de faire de belles prises sans Bracketing
Le format C-RAW
Voici encore un de ces points dont personne ne parle, il est plus intéressant de compter les pixels pourtant ceci est un vrai cadeau offert aux utilisateurs. Avez-vous déjà été limité par le stockage de votre MacBook ou de votre librairie Lightroom parce que vous travailliez sur plusieurs projets en même temps ? Les hybrides Canon R et RP offrent un format compressé étonnamment léger. A titre de comparaison, l’EOS RP et le FujiFilm X-T3 affichent la même résolution de 26 Mpx, pourtant en prise RAW+JPEG, une carte mémoire de 64MB autorisera 800 clichés chez Fuji contre 1800 chez Canon. Vous avez bien lu, il y a 1000 clichés d’écart avec les conséquences que ceci implique pour nos disques de stockage ou nos librairies Lightroom. Canon annonce une dégradation minimale liée à la compression mais je n’ai pas encore eu l’occasion de m’en plaindre, je ne pousse certainement pas assez mes fichiers jusqu’à leur limite. La possibilité d’utiliser le format RAW traditionnel reste offerte aux utilisateurs les plus exigeants s’ils le souhaitent.
L’autofocus
Le Dual Pixel n’a plus de preuve à faire donc je n’en parlerais pas, il est fiable et efficace mais ce n’est pas la rapidité d’un boitier sportif de type 1DxII ou Sony A9. Toutefois, deux points ici m’ont changé la vie:
- Plus de problème de front/back focus avec mes objectifs Sigma ART et plus globalement la mise au point est plus précise même avec mon vieux Canon 85mm 1.8 à pleine ouverture. Avec ceci, la détection de l’oeil est un vrai plus pour des portraits à pleine ouverture.
- Une autre force de ce nouveau modèle par rapport aux reflex est la sensibilité en basse lumière. La mise au point est nettement plus aisée dans les salles obscures avec mes optiques EF.
La bague d’adaptation
Je vous épargne le couplet sur le fait que tous mes objectifs EF Canon et Sigma fonctionnent aussi bien sinon mieux que sur reflex. La bonne surprise concernant cette bague est qu’elle est également compatible avec les objectifs EF-S et transforme l’EOS R en Aps-C de 12 Million de pixels. J’entends les puristes s’insurger : MAIS DE QUOI IL PARLE CELUI-LA ? Quel intérêt d’avoir un appareil aussi coûteux pour le transformer en Aps-C avec une résolution de smartphone ? La réponse a été une surprise pour moi également mais c’est le Canon EF-S 55-250mm.
Cet objectif est le seul survivant de mon ancien kit Aps-C. Aujourd’hui, 80% de mes photos sont réparties entre mon grand angle 16-35L et mon 50mm. J’adore mon 70-200mm 2.8L mais son poids est rarement justifié dans mon sac pour l’usage que j’en ai. Pourtant, la vie du photographe est cruelle, il y aura toujours ce moment où l’on souhaitera aller plus loin, juste un peu, juste une fois. Dans ces situations, je suis heureux d’avoir, pour seulement 300 grammes, un équivalent 400mm avec un piqué décent et une stabilisation. Que pensez-vous de la différence ?
L’écran tactile inclinable
Voici un autre « game changer » en comparaison aux 5DIII et 5DIV. Je parlais plus haut du remplacement de mon trépied mais ceci ne s’est pas fait sans concession. En plus de n’accepter que des charges en dessous de 3 kilos, mon trépied culmine à 1m40 désormais, je fais 1m80. Précédemment, j’aurais dû mettre un genou à terre et me courber pour faire chacune de mes opérations, plus maintenant, je reste debout et j’opère depuis l’écran. Bonus: Les compositions à ras du sol sont enfin accessibles sans me coucher par terre.
Autres points très appréciables
Le viseur électronique
Je porte des lunettes et ai toujours privilégié les écrans au dos des boitiers plutôt que les viseurs qui sont pour moi assez inconfortables chez Canon comme ailleurs. J’entend les purismes s’insurger une fois encore: “CE N’EST PAS UN VRAI PRO CELUI-LA”. Bien que j’utilise assez peu la visée sur hybride comme sur reflex, je suis conquis et forcé de constater que la visée électronique est une sacrée révolution, c’est un de ces points sur lequel je ne vais pas m’attarder parce qu’il faut le voir et l’expérimenter pour comprendre le changement. Je me surprend plus qu’avant à ôter mes lunettes et faire comme “les vrais pros”, la résolution est digne d’un écran de téléviseur, je peux zoomer dans l’image, vérifier la mise au point, le piqué et même afficher mon histogramme. Je recommande de l’essayer pour se faire sa propre idée.
Le Focus Peaking
Je ne vais pas m’étendre ici non plus parce que tous les hybrides l’offrent mais c’est un vrai atout qui m’a permis d’adapter mes objectifs argentiques. On pense à l’hybride comme une solution couteuse mais les objectifs manuels sont très accessibles et leur utilisation sur des boitiers de ce type est de plus ne plus populaire.
https://phototrend.fr/2017/11/mp-202-focus-peaking-mise-au-point-photo/
Mon post Venise - Partie 1 est réalisé intégralement avec un objectif manuel.
L’ergonomie / prise en main
Si vous faites de la randonnée ou voyagez en sac à dos, vous avez dû remarquer que certains sacs, bien que plus lourds sur la balance, peuvent paraitre plus légers une fois portés s’ils ont des bretelles bien rembourrées et une ceinture ventrale efficace. Mon expérience des boitiers est similaire: Avoir une bonne prise en main et des boutons bien placés m’est indispensable et le R m’offre ce que je n’ai pas su trouver chez Fuji ou Sony.
En guise de référence, la poignée du R correspond à celle du 6DII c’est-à-dire un poil plus petit que celle du 5DIV
Personnellement, j’était un peu inquiet du placement des boutons légèrement différent des reflex traditionnels Canon mais les différences sont minimes et la transition s’est faite très rapidement.
L’autonomie
800 photos environ sur une charge. Un peu moins si je fais des poses longues, un peu plus si je fais des rafales.
Performance ISO
La tolérance au grain est très variable d’un photographe à un autre. Je vous laisse juger des exemples ci-dessous à 4 000 ISO à gauche et 10 000 ISO à droite. (Cliquez pour agrandir)
Ce boitier est bon, c’est un 5DIV sans miroir mais si vous espérez remplacer votre gros zoom F/2.8 par un équivalent F/4 à l’intérieur d’une cathédrale… ce n’est pas encore Rock’N’Roll chez Canon. Je ne veux pas laisser entendre que la performance ISO est mauvaise, c’est tout l’inverse mais je pense qu’à ce prix, en 2019 et en comparaison à ce que fait mon Fuji X-T3 en Aps-C, l’écart n’est pas celui que j’aurais anticipé. Canon aurait dû faire beaucoup mieux.
Mon post Une nuit à Tokyo est intégralement réalisé sur X-T3, impressionnant pour un petit capteur.
Quelles sont mes principales frustrations ?
Absence d’intervallomètre en photo
Voilà une de ces limitations purement marketing dont Canon a le secret. Le 5DIV en est pourvu, le 6DII et l’EOS RP aussi. On peut faire un Time-Lapse vidéo mais impossible de programmer une série de photos pour les éditer manuellement ou n’en choisir qu’une. J’ENRAGE !
Absence de Joystick
L’écran tactile sert de joystick, c’est très fluide et ça fonctionne très bien… sauf en hiver si vous portez des gants et à la plage si vous avez des mains mouillées.
Absence de stabilisation du capteur
Je peux vivre sans, ceci n’est pas la question mais compte tenu de ce que fait la concurrence et du positionnement tarifaire de ce boitier, voila encore un détail qui fait tâche. J’adorerais pouvoir stabiliser l’intégralité de mes focales fixes.
Les objectifs ne maigrissent pas assez (mais c’est le cas ailleurs également)
Le 35mm RF 1.8 est exceptionnellement petit et respectivement 30 et 175 grammes plus léger que le 35mm F/2 EF moins lumineux et le Tamron SP 35mm 1.8 équivalent. Le nouveau 70-200 2.8 est annoncé plus court et plus léger de près de 30%, une sacrée prouesse là également. Ces optiques sont pour l’instant des exceptions, toutes les autres propositions RF à cette date sont aussi volumineuses et lourdes que leur équivalent EF.
Le viseur électronique
Etonnant, j’en ai parlé plus haut dans mes principales satisfactions. Je glisse ici une mini plainte car quand vous êtes à la rafale maximale, les images dans le viseur sont des playbacks des photos déjà prises et pas la scène photographiée en direct. Le décalage est très faible mais le photographe animalier qui veut suivre la course d’un guépard n’achètera pas ce boitier.
J’aime me plaindre et j’aurais adoré trouver de quoi rallonger cette liste mais je suis véritablement content de cet appareil. Ça fait un an qu’il me suit partout, prend la pluie, le sable et tombe du trépied sans jamais faillir. En définitive, J’ai été suffisamment convaincu pour que la famille s’agrandisse !
Canon EOS RP
Si vous avez réussi à lire ce post jusqu’ici, vous allez inévitablement vous interroger sur la comparaison entre le R et son petit frère RP. Le tarif du dernier né est plutôt “attractif” et votre interrogation est légitime. LEQUEL CHOISIR ?
Ma réponse : Ça Dépend !
Si vous êtes vidéaste, le choix est facile, le RP n’est pas pour vous.
Si vous faites principalement du paysage ou de l’animalier et que le contre jour et la dynamique sont régulièrement une inquiétude, là également, le choix est facile, le RP n’est VRAIMENT pas pour vous.
Si vous espérez capturer un battement d’ailes d’oiseau ou le match de foot de votre fils avec une rafale, le RP n’est pas pour vous.
Si vous utilisez principalement des optiques avoisinant le kilogramme, le RP devient très inconfortable et n’est pas pour vous.
Si vous portez des lunettes et n’aimez pas shooter à l’écran, le viseur du RP est beaucoup plus petit que celui de son aîné et ne sera probablement pas pour vous.
Si pour une raison étrange vous refusez d’avoir une seconde batterie de la taille d’une boite d’allumette en réserve dans votre poche ou sac… bah, le RP n’est pas pour vous.
Dans tous les autres scenarii, il n y a aucune raison de dépenser davantage pour s’offrir le grand frère tant ils se ressemblent. La différence 30 versus 26 Millions de pixels n’est pas perceptible, la performance ISO est identique et toutes les autres mini différences ne justifient pas l’écart de prix en utilisation terrain. La dynamique et la rafale sont pour moi suffisamment nécessaires pour privilégier le R mais ce ne sera pas le besoin de la plupart des utilisateurs.
A noter que bien qu’inspiré du 6DII, le RP a une meilleure performance en ISO que ce dernier, probablement parce qu’il partage le même processeur que le R. Toute proportion gardée, on parle d’1/3 d’IL si vous zoomez dans l’image, ça ne changera pas votre vie.
Si vous n’avez pas déjà un pied dans l’univers Canon, le FujiFilm X-T3 mériterait davantage votre considération.
A la fin de la journée, je suis juste très content de mon passage à l’hybride. L’EOS R n’est pas parfait, aucun appareil ne l’est mais si vous n’arrivez pas à faire de belles photos avec… Ce n’est probablement pas la faute de l’appareil !